Nous passons le tiers de notre vie à dormir, le sommeil est un besoin fondamental de tout être vivant au même titre que respirer et manger. La privation de sommeil entraîne des conséquences graves : troubles du comportement, puis hallucinations et mort par épuisement.

Dans notre société, qui valorise le mouvement et l’activité, le sommeil est souvent perçu comme une perte de temps. Et pourtant, dormir est essentiel pour tous mais surtout pour les enfants puisque outre la récupération physique et nerveuse, c’est pendant le sommeil que sont secrétées les différentes hormones dont celles nécessaires à sa croissance, elles stimulent également les défenses immunitaires et mettent en place les circuits nerveux qui favorisent la mémorisation et les apprentissages. De la vie fœtale à l’adolescence, le sommeil se construit et s’organise, et il est important d’avoir un minimum d’informations sur la physiologie du sommeil (de mieux en mieux connue) pour éviter les troubles du sommeil. Comme tout ce qui vit, nous sommes des êtres cycliques et l’alternance veille sommeil correspond à l’un des cycles fondamentaux de la vie, le rythme circadien. Le sommeil est organisé en cycles, et une nuit se décompose en plusieurs cycles avec un micro-réveil entre 2 cycles.

Le sommeil 

  1. Le sommeil du nouveau-né :

Il n’y a pas de périodicité jour-nuit (rythme cérébral dit fœtal sur 25h). Le nouveau-né dort beaucoup (14h à 18h) et alterne des états de vigilance différents : sommeil calme et sommeil agité, éveil calme et éveil agité. Le bébé s’endort en sommeil agité (qui représente 50 à 60% du sommeil total) mais attention il ne faut pas confondre ce sommeil avec une période d’éveil. Les cycles durent en moyenne 50 min.

2. L’enfant de 1 mois à 6 mois

C’est le moment de la vie où le sommeil évolue le plus rapidement, période de transition entre le sommeil du nouveau-né et celui de l’adulte.

  • Apparition des rythmes circadiens de la température, du pouls, de la respiration et des sécrétions hormonales
  • Apparition d’une périodicité jour-nuit
  • Diversification des phases de sommeil

La périodicité jour-nuit apparaît vers l’âge d’1 mois avec une longue phase d’éveil entre 17h et 22h, éveil agité avec pleurs incoercibles (dysrythmie du soir). La qualité du sommeil change : de moins en moins agité et de plus en plus calme. A partir de 3 mois, on ne parle plus de sommeil calme mais de sommeil lent (léger plus profond), ni de sommeil agité mais de sommeil paradoxal (celui des rêves). L’enfant s’endort en sommeil lent, léger puis de plus en plus profond, et chaque cycle finit en sommeil paradoxal. Puis un autre cycle commence. Les cycles de sommeil s’allongent (1h30-2h) et s’enchainent 4 à 6 fois par nuit. Pendant cette période charnière, fragile, où il structure son sommeil, il faut respecter ce dernier tout en l’aidant si besoin à trouver son rythme grâce aux « donneurs de temps », organisateurs biologiques et neurologiques comme l’alternance lumière-obscurité, la régularité des repas, du bain, les temps de stimulations et de relation.

3. Entre 6 mois et 4 ans

Le temps de sommeil diurne diminue progressivement, passant de 3-4 siestes à 2 siestes vers 6-9 mois puis une seule vers 18 mois, moment où disparait celle du matin.
A 6 mois, le bébé dort 10 à 12h par nuit, 15h en moyenne avec les siestes.
A 12 mois, le sommeil de l’adulte est installé;  il a besoin de 2 siestes et dort 14h en moyenne.
Entre 18 mois et 3 ans, l’enfant présente une grande excitabilité psychologique :

  • Excitation due à l’apprentissage de l’autonomie, les découvertes
  •  Importance du phénomène d’oppositions : l’âge du « non »
  • Inquiétude par la conscience de ses propres limites.

Une bonne activité diurne notamment à l’extérieur, le respect du rituel (pas plus de 15min) et du doudou quotidien et immuable, des paroles fermes et rassurantes le soir au coucher aideront l’enfant à s’endormir dans un climat sécurisant. Grandir est une histoire faite de découvertes et de séparations, une histoire qui nous confronte à l’inconnu, à la peur d’être abandonné, à la peur de ne pas être à la hauteur, peur de l’échec. L’enfant est confronté à des craintes et une agressivité nouvelles qui engendrent de grandes colères face à la frustration et à son impuissance. Il faut respecter ses peurs, les écouter sans les encourager, le rassurer. « Grandir fait peur, mais les peurs font grandir »

Les Troubles Du Sommeil

1. Les troubles du sommeil de la première année

Ces troubles sont souvent liés à des problèmes physiologiques et alimentaires. Les causes médicales entraînent des réveils surtout en première partie de nuit, elles troublent le sommeil lent

  •  Les coliques liées à l’immaturité du tube digestif
  •  Les poussées dentaires
  • La peau irritée
  • Le reflux gastrique
  • Les apnées obstructives du sommeil
  • L’encombrement bronchique

Le sommeil est lié à l’alimentation : prise des repas à heures régulières aide l’enfant à trouver un rythme de sommeil. Jusqu’à 6 mois, il est assez normal que l’enfant se réveille la nuit, la tétée de nuit disparait entre 3-6 mois. Les troubles du sommeil peuvent trouver leurs origines dans les causes relationnelles :

  •  Des pratiques éducatives mal adaptées
  • Une hyper stimulation qui peut entraîner un endormissement difficile ou conduire l’enfant à se protéger dans un excès de sommeil (hypersomnies)
  •  Une discontinuité affective 
  • Dépression maternelle
  •  Histoire familiale

Conseils aux parents : Ne soyez trop pressé pour que votre enfant fasse ses nuits (les 6 premiers mois)

  • Supprimer l’alimentation la nuit, quand l’enfant en est capable
  • Faire la différence entre le jour et la nuit : peu de lumière la nuit, le minimum de stimulations, pas d’obscurité pendant la sieste
  • L’enfant peut dormir avec ses parents jusqu’à 6 mois, ensuite progressivement laisser l’enfant s’endormir dans son lit. Aux parents de faire ce qui leur convient
  • Rassurer l’enfant en le berçant mais sans le secouer…
  • Associer le papa, impliquer les deux membres du couple

2. La deuxième année :

Au cours de la 2ème année, la problématique du coucher est liée à celle de la séparation. Dormir, aller au lit, se séparer : quitter un lieu ou un autre, quitter une activité pour une autre, quitter ses parents. L’angoisse de séparation se réactive donc pour un enfant dans ces moments-là. S’il se sent en sécurité dans le lieu, s’il a trouvé le moyen de se rassurer tout seul (ex : avec doudou), l’enfant parviendra à surmonter cette angoisse. Sinon il va réclamer une présence pour s’endormir, retarder le plus possible ce moment. Il risque aussi de ne pas s’abandonner au sommeil. Il reste comme vigilant, un rien le réveille. Il se réveille et appelle pour vérifier que tout est toujours en place pendant son sommeil (le décor, papa et maman) parfois plusieurs fois dans la nuit. L’enfant va réclamer des rituels d’endormissement : ils vont se répéter de la même façon chaque soir, lui témoignant qu’il pourra s’endormir et se réveiller tranquille dans le même cadre après sa nuit ou sa sieste. Parents et enfants inventent souvent ensemble ce rituel : comptines, histoires, câlins. Ce rituel doit aussi favoriser l’abaissement de la stimulation et de l’excitation de l’enfant. Ce rituel du soir est le point d’ancrage du sommeil de nuit pour l’enfant. Les cauchemars font leur apparition en lien avec la capacité de l’enfant de symboliser ses émotions. Il revit et transforme ses cauchemars, les émotions, les peurs de la journée. Ses premières expériences de la marche, de l’éloignement nourrissent probablement ces peurs. C’est une activité saine, témoignant d’un bon développement. Il convient de rassurer l’enfant, de rester un peu près de lui pour lui permettre de se rendormir sans crainte de retrouver un cauchemar. Quand il aura plus de 2 ans, on pourra lui expliquer la différence entre rêve et réalité.

Conseils aux parents

  • Adopter des horaires adaptés aux besoins de votre enfant, en prenant en compte son évolution (diminution des siestes)
  • Etre réguliers dans les pratiques
  • Savoir s’adapter à des situations particulières : déménagement, arrivée d’un petit frère, acquisition de la propreté,…
  • La qualité du sommeil se construit le jour : qualité des activités, dépense corporelle, attention accordée à l’enfant, interdits clairement posés, qualité de la relation à l’enfant
  • Attention à l’usage des jeux vidéo et de la télévision. Les enfants de moins de trois ans ne sont pas en capacité de donner du sens aux images. Elles viennent heurter leur imaginaire.

3. La troisième et quatrième année :

En lien avec le cauchemar, certains enfants vont développer la peur du noir, inquiétante, propice à l’apparition d’ombres. Laisser une veilleuse peut suffire à résoudre ce problème. Le sommeil peut devenir à cette période un enjeu d’opposition avec les parents : l’enfant refuse d’aller au lit, fait durer les rituels, se lève de son lit. Les parents sont souvent démunis, ils sont parfois ainsi privés de leur temps personnel du soir sans enfant. Pour aider les parents à retrouver une plus grande sérénité dans les couchers, on peut travailler avec eux les questions suivantes :

  • Les événements familiaux ?
  • Les pratiques éducatives dans la journée ?
  • Quel temps précède le coucher (usage de la télévision,…) ?
  • Quel est le rituel du coucher ?
  • L’horaire du coucher est-il adapté ?

Conseils aux parents

  •  Ecouter et observer l’enfant pour faire la différence entre opposition et vraie angoisse au coucher
  •  Rester ferme sur le durée du rituel d’endormissement et ne pas culpabiliser de mettre son enfant au lit

Les différents troubles du sommeil chez l’enfant  

 ➡ Les terreurs nocturnes : Angoisse paroxystique et impressionnante : l’enfant est retrouvé assis dans son lit après un cri. Il a les yeux grands ouverts et parait effrayé, voir halluciné. Il peut paraitre se débattre et ne reconnait pas ses proches. L’épisode ne dure pas plus d’1/4 d’heure puis l’enfant se rendort. Au réveil, l’enfant ne se souvient de rien, cet épisode peut être unique ou répétitif.
➡ Somnambulisme : Activité motrice et inconsciente, sans souvenir au réveil. Apparait entre 5 et 12 ans, plus fréquent chez les garçons. L’accès peut durer environ 10 minutes, plutôt en début de nuit. Il n’y a aucun danger à réveiller l’enfant.
➡ La somniloquie : parler dans son sommeil.
➡ Les rythmies d’endormissement : balancements de la tête et duc corps avec parfois des bruits de heurts plus ou moins violents. Peut apparaitre dès l’âge de 4-5 mois.
➡ L’énurésie : Non pathologique avant 5 ans.
Le bruxisme : Claquement ou grincement des dents.
Les insomnies d’endormissement
Les cauchemars
➡ Les hypersomnies : excès de sommeil

Conclusion :

Faire la différence jour-nuit dès le 1er mois :

  •  Les tétées de nuit doivent être faites dans le calme et la pénombre avec le minimum de stimulations.
  •  Sieste en lumière tamisée, avec un bruit réduit.
  • Sortir l’enfant ne peut que favoriser son sommeil nocturne. Faire dormir l’enfant au bon moment pour lui :

 Repérer ses signes de fatigue. 

  • Coucher l’enfant à heures régulières.

Respecter le sommeil de l’enfant :

  •  Ne pas le réveiller au milieu du cycle
  • L’aider à continuer son sommeil entre 2 phases ou entre 2 cycles s’il en a besoin.

Offrir à l’enfant de bonnes conditions de sommeil : 

  • Lit adapté, matelas ferme, rien dans le lit, pas de couette, pas d’oreiller, enfant couché sur le dos. 
  • Pièce aérée, température modérée autour de 18°.

Accompagner l’endormissement de l’enfant : 

  • Bercements et paroles, mise en place d’un rituel de coucher.
  • Rassurer l’enfant sur la présence de ses parents en cas de changement de lieu.
  • Il est préférable que la personne qui couche l’enfant soit présente à son réveil.

Réguler les habitudes alimentaires : 

  • Supprimer la tétée de nuit quand l’enfant n’en a plus besoin.
  •  Eviter que l’enfant s’endorme en tétant.

Aller vers un endormissement autonome :

L’enfant a besoin d’être accompagné au moment d’aller dormir mais il est important qu’il parvienne à s’endormir seul. C’est signe qu’il n’est pas angoissé à l’idée de dormir. En laissant l’enfant seul dans son lit (après le rituel…), l’entourage fait signe à l’enfant qu’il ne risque rien et qu’on lui fait confiance pour s’endormir. Quand l’enfant se réveillera, en fin de nuit ou entre deux cycles, il retrouvera les conditions de son premier endormissement et pourra se réveiller sereinement ou se rendormir seul paisiblement. Si à l’inverse, il constate que maman n’est plus à côté de lui, que le sein lui manque, qu’il a changé de lit, il va s’inquiéter et appeler.

Source : Dr Annik Hallot

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